Dérivée covariante-d'échelle

Nous pouvons décrire le déplacement élémentaire dX comme la somme d'une moyenne, <dx+/-> = v+/- dt, et d'une fluctuation par rapport à cette moyenne, dx +/-, qui est donc par définition de moyenne nulle: <dx+/-> = 0, c.-à.-d.:

   (1)

Considérons tout d'abord les déplacements moyens. L'irréversibilité fondamentale de la description est maintenant apparente dans le fait que les vitesses moyennes avant et arrière sont en général différentes. Nous sommes ainsi amenés à définir des dérivées moyennes avant et arrière, d+/dt d-/dt. Quand elles sont appliquées au vecteur de position x, elles donnent les vitesses moyennes avant et arrière et .

En ce qui concerne les fluctuations, la généralisation du comportement fractal à trois dimensions s'écrit

   (2)

où  représente un paramètre fondamental qui caractérise la nouvelle loi d'échelle (à ce niveau simplifié de description). Les dx(t)'s sont de moyenne nulle et mutuellement indépendants. Si on les suppose être aussi Gaussiens, ce processus devient un processus de Wiener standard. Mais une telle supposition n'est pas nécessaire ici, car seule la propriété (2) sera utilisée dans les calculs.

Notre outil principal consiste à présent à retrouver la réversibilité temporelle locale à l'aide d'un nouveau processus complexe (Nottale 1993a). Pour celà, nous combinons les dérivées avant et arrière en termes d'un opérateur de dérivation complexe

   (3)

qui, quand il est appliqué au vecteur de position, donne une vitesse complexe

  (4)

L'intérêt d'un tel choix est que, à la limite classique ( ), la partie réelle V de la vitesse complexe  s'identifie à la vitesse classique, tandis que sa partie imaginaire, U, s'annule. Celle-ci est une nouvelle quantité provenant de la non-différentiabilité. Le dédoublement du champ de vitesse, v --> (V, U), est le comportement physique nouveau essentiel, dont les nombres complexes et le produit complexe ne sont qu'une représentation. Un autre type de produit aurait pu être choisi, mais on peut montrer que le produit complexe réalise la représentation la plus simple (autrement dit, covariante).

L'équation (2) nous permet maintenant d'obtenir une expression générale pour la dérivée temporelle complexe . Considérons une fonction f(x(t),t). Contrairement à ce qui se passe dans le cas différentiable, sa dérivée totale par rapport au temps contient des termes finis jusqu'à un ordre supérieur à 1(Einstein, 1905). Dans le cas particulier de la dimension fractale 2, seul le second ordre intervient. En effet sa différentielle totale s'écrit

  (5)

Classiquement le terme dXi dXj  / dt  est infinitésimal, mais ici sa moyenne se réduit à <dxi   dxj> /dt, de sorte que le dernier terme de l'Eq. (5) se réduira à un Laplacien grâce à l'Eq. (2). Donc

    (6)

En insérant ces expressions dans (3), nous obtenons finalement la forme de l'opérateur de dérivation temporelle complexe (Nottale 1993a):

    (7)

Le passage de la mécanique classique (différentiable) à la nouvelle mécanique nondifférentiable peut maintenant être mis en oeuvre par une prescription covariante: Remplacer la dérivée temporelle standard d/dt par le nouvel opérateur complexe . En d'autres termes, cela signifie que  joue le rôle d'une dérivée covariante-d'échelle (en analogie avec la relativité générale d'Einstein où l'outil fondamental consiste à remplacer  par la dérivée covariante ).